Mon père, le soleil et le mélanome : ce qu’on ne voit pas toujours

Mon père a eu un mélanome.

Mon père m’a eue à 40 ans. On avait 40 ans d’écart, et malgré tout, on s’est toujours compris. Il s’appelait Antonio. Il était Portugais, un vrai, avec l’accent qui chante et la force dans les bras. À 19 ans, il a quitté le Portugal pour le Brésil, où il a vécu seize ans. Là-bas, il s’est laissé envelopper par le soleil. Le soleil, toujours le soleil.

Il est ensuite revenu au Portugal, s’est marié avec ma mère, puis ils sont partis en France pour offrir une autre vie à leurs enfants. Quatre enfants : Roberto l’aîné, puis moi, Catia, et les jumeaux Patricia et Filipe.

Mon père, c’était un pilier. Un patriarche comme on en voit dans les vieux films. Fort, présent, charismatique. Il entrait dans une pièce, et tout le monde le remarquait. Il faisait des blagues, il râlait parfois. Il n’a jamais été le genre d’homme à parler de ses douleurs, encore moins à s’en plaindre. Il avait cette manière rassurante d’être là. De faire bouclier. Il était le roc.

Et puis, un jour, on a vu cette tache sur son dos. Une tache un peu floue, comme gribouillée au crayon. Il disait qu’un médecin l’avait vue, que ce n’était rien. On voulait le croire. C’est ça aussi, les hommes à l’ancienne : ce qu’on ne voit pas, n’existe pas. Surtout quand c’est sur la peau.

Mais cette tache a changé. Elle a saigné. Elle a grandi. Quand les examens sont enfin arrivés, le verdict est tombé : mélanome, stade avancé. On ne savait pas trop ce que ça voulait dire, mais on a tout de suite senti que c’était grave.

Pendant un an, il a été en forme et suivi tous les trois mois et puis il a eu mal à l’aine et tout s’est enchainé, on lui a retiré la chaine ganglionnaire et les ganglions étaient atteints. Il a quand même tenu à ce moment là.

Il devait commencer un traitement, une immunothérapie. Au début, il reprenait des forces, on y croyait. Et puis il a eu mal au ventre, puis à la tête. Tout s’est enchainé. Des métastases. Trois dans le cerveau. Une grosse, de trois centimètres. Il a reçu en première ligne une thérapie ciblée, des médicaments à prendre par voie orale. Les lésions ont diminué et puis tout est revenu au bout de quatre mois, dans le cerveau. Il a subi une radiothérapie du cerveau entier. Il a tenu, longtemps, comme il pouvait, comme un roc justement. Et puis un jour, son regard n’était plus là, sa mémoire non plus…

Deux ans après le début de la bataille, il est parti. Il avait 74 ans. Je remercie l’hôpital Saint-Louis qui a tout fait pour le sauver.

Ça fait maintenant sept ans. Et pas un seul jour ne passe sans que je pense à lui. Il m’accompagne dans mes silences, dans mes éclats de rire, dans mes décisions et dans mes failles. Il est là. Toujours. Mon père.

Le mélanome, c’est quoi exactement ?

Le mélanome est un cancer de la peau. L’un des plus graves. Il peut apparaître sur une tache déjà existante ou surgir sans prévenir, sur une peau claire ou foncée, chez les jeunes comme chez les plus âgés. Ce qui le rend redoutable, c’est sa capacité à évoluer vite, très vite, et à se propager dans tout le corps.

Comment reconnaître un mélanome ?

Il existe une méthode simple pour être vigilant : la règle ABCDE

  • A pour Asymétrie : une tache qui n’est pas symétrique.
  • B pour Bords irréguliers.
  • C pour Couleur : plusieurs nuances dans une même tache.
  • D pour Diamètre : supérieur à 6 mm.
  • E pour Évolution : une tache qui change de forme, de couleur ou qui saigne.

Si vous avez une tache qui vous semble suspecte, ne laissez pas passer.

Que faire si vous repérez une tache douteuse ?

Consultez. Immédiatement. Un dermatologue, de préférence. Il vaut mieux entendre “ce n’est rien” que de passer à côté de ce qui pourrait être grave. Un simple examen de la peau, une dermoscopie ou une biopsie peuvent sauver des vies. On pense souvent que c’est anodin. On a tort.

Et puis, prenez soin de vous

Le soleil fait du bien à l’âme, mais il laisse parfois des cicatrices invisibles. La peau ne plaisante pas. Ce n’est pas un détail. C’est notre protection, notre frontière avec le monde. Apprenez à l’aimer, à la regarder, à la surveiller. Parce que parfois, ce qu’on ne voit pas peut faire basculer une vie. Ou en emporter une.

Quelques liens utiles:

Mélanome et facteurs de risque

L’essentiel sur le mélanome

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